La Fondation Pierre-Arnaud à Lens (VS) propose jusqu’au 20 mai 2018 une exposition consacrée à l’art aborigène. Départ pour une initiation du bout du monde, down under!
Le Rêve où tout commence
Les aborigènes…qui sont-ils ? Il n’existe pas un peuple aborigène, mais des milliers de clans répartis sur tout le territoire de l’Australie, chacun possédant son dialecte et une manière propre de raconter le Rêve. Ainsi, le Rêve est la création du monde, un peu comme la Genèse dans le christianisme. En définitive, cet art va au-delà de simples points blancs et de kangourous, au-delà de ce qui semble être des dessins d’enfants pour des yeux occidentaux.
Cet Univers ne s’est pas fait seul, mais par l’entremise d’animaux sacrés. Par leurs tribulations dans le désert, ils ont créé l’Univers (ne me demandez pas qui de la poule ou l’oeuf était le premier!). Dans ce panthéon animalier, les figures du serpent Arc-en-ciel, le kangourou ou l’opossum sont récurrents. Outre ces animaux, les aborigènes croient aussi aux esprits habitant toute chose. A la mort d’un membre d’une tribu, son corps est d’abord laissé en décomposition (vous ne mangez pas j’espère?), puis ses os sont rendus à la terre. Dans un cycle éternel, la terre et l’homme sont intimement liés.
L’art comme guide et identité
Concernant la forme que prend l’art aborigène, ce sont d’abord des dessins éphémères tracés dans le sable ou dessinés sur les rochers. Destinés entre autre à repérer des points d’eau ou comme leçons de chasses, ces dessins sont aussi amenés à disparaître. Seuls le bouche-à-oreille et la mémoire perpétuaient cet art ancestral (avant l’arrivée des colons). Le respect du Secret est d’ailleurs important encore maintenant: on ne dévoile pas tout, mais on garde une part de mystère au sein de son clan. Chaque tribu raconte une partie du Rêve à sa manière, avec l’utilisation de couleurs propres à son territoire. Par exemple, un épisode du Serpent Arc-en-Ciel, demi-dieu un peu schizo, tantôt bienfaisant, tantôt destructeur.
Le fait de peindre sur des supports durables est récent (années 70), avec des matériaux toujours naturels, comme l’écorce d’Eucalyptus. La couleur ocre est faite à partir de la terre du même nom, cette terre orange se trouvant notamment au centre de l’Australie. Cet ocre compose le Mont Uluru, lui conférant ces couleurs orange et rouge feu, selon le moment de la journée. D’autres éléments naturels sont intégrés dans les œuvres comme des tiges, des nacres de coquillage ou du sable.
L’art comme guérison
A l’arrivée des colons britanniques au 17ème siècle, le peuple aborigène sera marginalisé, privé de sa langue et de sa culture. Ce peuple présent sur le continent depuis plus de 50’000 ans, a non seulement été décimé, mais aussi parqué à la manière des indiens d’Amérique. Ce n’est qu’en 2015 que le gouvernement australien demanda pardon au peuple aborigène pour ces exactions. Dans un effort de reconnaissance et de revalorisation de la culture aborigène, leur art est exposé pour sensibiliser la population à leur histoire et pour préserver ce qu’il reste de ce fragile patrimoine.
Aller à leur rencontre
Lors de mon périple en Australie, j’ai participé à un atelier de peinture avec deux femmes aborigènes. Elles étaient timides et discrètes, des traits de caractère familiers à ce peuple lié au Secret. Pendant que notre groupe peignait des boomerangs, ces femmes ont témoigné comment les filles, dans leur société traditionnelle, ont des enfants très tôt, continuent à se transmettre des récits ancestraux, mais surtout sur le regard encore discriminant de la société australienne blanche envers eux. Alors qu’ils étaient les premiers, First Nation, en Australie, le chemin vers leur reconnaissance est encore long.
Entre mon voyage et les tableaux aborigènes, mon impression est que leur histoire mérite d’être racontée loin, au-delà des déserts et au-delà des océans, par bonds de kangourous ou vol de goélands !
Littérairement vôtre,
Anaïs
Lectures:
- L’ivresse du kangourou, A toute berzingue, La vengeance du Wombat (Kenneth Cook)
- Kangouroad Movie (A.D.G, Alain Fournier)
- Le message des hommes vrais aux hommes mutants (Marlo Morgan)
Les trois articles de mon roadtrip:

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