Je fais partie du même club que lui. Pas celui des toqués du guide Michelin, ni de ceux qui décrochent des étoiles. Cet astre, je l’aperçois seulement à la nuit tombée ou en me payant un poteau. Je veux parler ici du Club des introvertis.
Les introvertis sont souvent doués dans leur discipline. Animés par un feu intérieur, l’introverti crée, dessine, assemble des éléments inédits, qui s’alignent comme par magie. Ma passion s’anime lorsque j’écris. Celle de Didier s’entretient en cuisine, à l’abri des regards indiscrets.
Tel un chevreuil vivant caché dans les bois d’Anniviers, Didier perfectionne son art dans son jardin. La tranquillité est certes relative en raison des bruits de casserole, des quelques engueulades qui caractérisent toute brigade. Installé sereinement à la proue de son navire, Didier descend rarement à quai.
Quelques personnes arrivent à le déloger pour faire une incursion en salle. Elles gravitent dans son milieu : chefs étoilés, critiques gastronomiques, connaissances faisant partie des meubles. Mon père fait partie de ces élus. Il faut dire que ce sympathique anniviard vigneron-montagnard coche pas mal de cases…sacré Maurice !
Lors de la soirée de soutien de Sierre-Zinal en 2021, Didier était présent en salle, telle une apparition divine. Son aura est inversement proportionnelle à sa carrure. Yeux bleu et petite stature, nous voilà deux points communs indéniables. Il prend du temps pour chacun, parle à voix basse. Il faut tendre l’oreille. Au fond, les mots sont superflus. La cuisine est fine, le personnel aux petits oignons, la magie opère.
En avril, Didier nous quitte. Il laisse à Sierre un établissement prestigieux dont l’aura dépasse les frontières cantonales. Pour ma part, le Terminus m’a permis de rencontrer mon compagnon et de fraterniser avec quelques membres du personnel. Pas avec tous, car rappelons que les introvertis choisissent avec soin avec qui ils s’épanchent sur leurs états d’âme.
Le 21 novembre dernier, la Sainte-Catherine battait son plein à Sierre. Faire ripaille une dernière fois au Terminus, c’est un peu comme assister au dernier concert des Spice Girls. Ça laisse un goût doux-amer. Mais même les meilleures choses ont une fin.
Non on « ne suit pas Didier en Anniviers », car on ne suit pas un consultant dans son bureau. Mais on peut aller tester les établissements à Grimentz et Zinal, skis au pied. De l’Atelier Gourmand, on garde en souvenir les saveurs de la chasse parfaitement cuite, les gouttes de sauce finement posées sur l’assiette, tous ces dessins qui prenaient vie dans l’assiette. Des éléments imaginés par un artiste, mis en lumière par sa brigade.
Merci Chef, Monsieur Didier ou Didier (à vous de choisir). Au plaisir de suivre vos aventures ainsi que celles de l’équipe du Terminus.
Les murs changent, la passion reste.
Nota Bene
Restaurants « Espace Weisshorn » à Zinal et hôtel restaurant « INALP Guernerés » à Grimentz.
Lire mon article sur le repas à l’emporter de la Fête des Mères de Didier (D.C)

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